Après le retrait de la CAN-2019 au Cameroun, jugé incapable d’être prêt dans les temps, la Confédération africaine de football s’est laissé un mois pour trouver un remplaçant. Avec un trio de favoris : le Maroc, l’Afrique du Sud et l’Égypte.
Déjà confronté à un contexte politique et sécuritaire compliqué, le Cameroun vient de subir un camouflet historique. À six mois du coup d’envoi de la Coupe d’Afrique des nations 2019, qui devait être la première sur son territoire depuis 1972, la sentence est tombée : tenants du titre, les Lions indomptables n’auront pas le privilège de défendre leur couronne sur leurs terres.
Rassemblé vendredi 30 novembre à Accra, au Ghana, le comité exécutif de la Confédération africaine de football (CAF) n’a pas, semble-t-il, hésité. Au regard de l’avancée du projet camerounais, « les conditions de conformité n’ont pas été respectées » et il y a, de fait, un « écart existant entre les exigences et obligations du cahier des charges de la CAN et la réalité du terrain ». Une situation inacceptable pour le président Ahmad, qui dirige la CAF depuis mars 2017, et qui a rappelé que de nombreuses personnes, par le passé, avaient « été blessées lors des CAN pour des raisons de conditions d’organisation ». Sans surprise, le couperet est tombé : « Aujourd’hui nous avons pris la décision de retirer la CAN 2019 au Cameroun. »
La tâche du désormais ex-pays organisateur n’était toutefois pas aisée. Lorsque le pays présidé par Paul Biya s’était vu octroyer l’organisation de cette CAN-2019, il était question de la tenue d’un tournoi à 16 nations dans quatre stades. L’élection d’Ahmad à la tête de l’instance dirigeante du football africain a tout changé : non contente de se jouer pour la première fois en été (15 juin – 13 juillet), elle a vu son cahier des charges évoluer unilatéralement pour passer à six stades et 24 sélections engagées. Un défi autrement plus difficile à relever pour le Comité d’organisation camerounais.
Comme la Libye en 2013 puis en 2017 ou encore le Maroc en 2015, pour des raisons bien diverses, le Cameroun n’a donc pas pu mener à bien son projet. Mais au-delà de cet échec patenté, une question supplante toutes les autres : où se tiendra la CAN-2019 ?
Le Maroc, ou le retour en grâce du banni
Sans surprise, la CAF a annoncé l’ouverture d’une nouvelle fenêtre de tir, afin que les prétendants au sauvetage se manifestent. Juste avant Noël, après 21 jours de réflexion, les pays intéressés devront avoir déposé leur candidature. Le processus de décision sera, lui-aussi, effectué en accéléré du côté de la CAF, qui a promis de tout faire pour « s’assurer qu’un nouveau pays-hôte soit trouvé d’ici le 31 décembre ».
Depuis des mois, alors même que le Cameroun était en sursis, trois favoris à la « reprise » se sont dégagés. Sans surprise, le premier d’entre eux est le Maroc. Le royaume chérifien a l’avantage de présenter une solide candidature, lui qui s’était engagé dans la course à l’organisation du Mondial-2026 face au trio nord-américain. Le dossier, remisé après la défaite, pourrait être ressorti et convaincre la CAF.
D’autant que si du temps de la présidence Hayatou, la CAF et la Fédération royale marocaine de football (FRMF) entretenaient des relations compliquées – et plus encore après le refus marocain d’accueillir la CAN-2015 en raison d’Ebola – les dynamiques ont changé à Accra. Depuis l’arrivée d’Ahmad, le Maroc a retrouvé sa place dans les rouages de la Confédération, et les relations se sont apaisées.
La décision des instances marocaines de dépanner la CAF, en acceptant d’accueillir le CHAN-2018 en octobre 2017, à tout juste trois mois du coup d’envoi de la compétition, a probablement fini de convaincre le patron du football africain : le Maroc est un candidat crédible, préparé, et qui sait réagir face à l’urgence.
L’Afrique du Sud, une assurance tous risques
Mais ce costume de sauveur que le Maroc se plaît à endosser depuis plusieurs mois est aussi taillé sur mesure pour un autre candidat potentiel. Habituée des rendez-vous de dernière minute, l’Afrique du Sud étudie sérieusement la possibilité d’accueillir à nouveau la Coupe d’Afrique sur son sol. Le seul pays du continent à avoir accueilli une Coupe du monde est lui-aussi une valeur sûre.
C’est le cas, déjà, sur le plan des infrastructures, puisque le Mondial-2010 lui a permis de se doter de dix enceintes aux normes internationales. La capacité des Sud-Africains à organiser un événement majeur dans l’urgence n’est également plus à démontrer. L’Afrique du Sud n’a organisé la CAN qu’à deux reprises, à chaque fois pour remplacer un pays écarté : le Kenya, en 1996, puis la Libye, en 2013. Un curriculum vitae qui ferait de la nation « arc-en-ciel » un adversaire de choix au favori marocain.
Les Pharaons entre raison et tentation
Derrière le duo, difficile aussi de ne pas mentionner l’Égypte, même si plusieurs sons de cloches sont parvenus des responsables de la fédération égyptienne. Vendredi soir, au micro de nos confrères de RFI, le porte-parole de l’instance était clair : « Nous sommes intéressés par l’opportunité d’organiser la Coupe d’Afrique des Nations. Nous n’allons pas dire non. »
Tandis qu’au même moment, un peu plus loin, Magdi Abdel Ghani, un membre du conseil d’administration de cette même fédération, se montrait beaucoup plus réservé : « L’Égypte ne présentera pas de dossier de candidature et estime qu’il y a un consensus pour que le Maroc accueille la compétition. »
Une notion de consensus qui fait référence au soutien avéré de l’Union nord-africaine de football (UNAF) – qui rassemble l’Égypte, les pays du Maghreb et la Libye – à la probable candidature marocaine. L’UNAF, qui n’a d’ailleurs pas hésité à user de son influence en envoyant à la CAF une lettre exigeant le strict « respect du cahier des charges pour l’organisation de la CAN-2019 » à quelques jours des délibérations du comité exécutif. Où comment appeler, de manière à peine voilée, à couper l’herbe sous le pied du Cameroun.
Cette position commune rend d’autant plus improbable un scénario qui verrait l’Égypte se dresser contre ses voisins sans avoir l’assurance de l’emporter, d’autant que sa candidature pourrait elle-aussi souffrir d’un contexte sécuritaire compliqué. En toute logique – un concept qui ne prévaut toutefois pas systématiquement ne football – les Pharaons devraient ainsi être amenés, eux-aussi, à se ranger derrière l’évidence marocaine.
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