A LA UNEPOLITIQUESOCIETE

Trois lois « Solutions » au système partisan du Bénin

La question des partis politiques a été posée dès les premiers pas de la démocratie moderne, au tournant des révolutions américaines et françaises (Scarrow 2002). Mais, si l’on voulait trouver leurs origines, c’est plutôt du côté de la monarchie parlementaire britannique qu’il faudrait les chercher. Ainsi, les partis sont largement indissociables de la représentation politique et de l’architecture des relations entre un collectif de mandants et un collectif de mandataires. C’est en cela que les partis ont été considérés historiquement non seulement comme consubstantiels à la démocratie moderne, mais également comme un préalable à l’invention de celle-ci. C’est bien d’ailleurs ce qu’affirme Schattschneider, figure centrale aux États-Unis de l’étude des partis au milieu du XXe siècle, dans sa citation célèbre :

« L’émergence des partis politiques constitue indubitablement l’une des caractéristiques distinctives des gouvernements modernes. Les partis ont joué le rôle central  de faiseurs de gouvernements, et plus spécifiquement de gouvernements démocratiques. Il faut préciser clairement que les partis politiques ont rendu possible la démocratie et que la démocratie moderne n’est pas concevable sans les partis politiques. En réalité, l’état des partis politiques est le meilleur indicateur possible de la nature de tout régime.

La distinction la plus importante en pensée politique moderne, celle distinguant démocratie et dictature, peut être appréhendée au mieux à travers les dynamiques partisanes. Les partis ne sont dès lors pas uniquement des annexes des gouvernements modernes; ils en constituent le cœur et y jouent un rôle déterminant et créatif. »

Les systèmes de partis: définition

Si les partis dépendent et évoluent en fonction de leur environnement, le regard peut aussi porter sur les partis non pas comme unités autonomes mais sur les interactions entre partis. Les partis sont en effet constitutifs d’un «marché» politique, opposant des acteurs en quête d’un bien qui reste central pour l’ensemble d’entre eux, le soutien populaire (Offerlé 1997). C’est dans cette perspective que la littérature a proposé de dégager un objet spécifique, les systèmes partisans.

Lors de son discours d’investiture le 15 juin 2015, Me Adrien Houngbédji, l’actuel Président de l’Assemblée Nationale du Bénin, a insisté sur “l’impérieuse nécessité d’une réforme approfondie du système partisan béninois” afin de réduire le nombre de partis politiques, d’instaurer plus de démocratie en leur sein, de les amener à se bâtir autour de projets de société, etc.

Le Président de la République du Bénin quant à lui, dans son discours d’investiture le 6 avril 2016 a également jugé utile de “souligner avec force, que l’enracinement démocratique du Bénin est largement tributaire du système partisan qui est celui des Béninois et des valeurs qu’ensemble nous envisageons de promouvoir.”

Il est clair que le système partisan dans notre pays souffre de plusieurs maux, qu’il faut impérativement chercher les moyens pour y remédier.

En effet, la dynamique qui s’observe depuis quelques années au niveau de la configuration de l’espace partisan du pays est inquiétante et même porteuse de risques voire de menaces. Le tableau ci-dessous montre de manière claire qu’il y a longtemps que le Bénin n’a pratiquement plus de parti politique digne de ce nom. Ils sont au fil du temps remplacés par des coalitions éphémères et autres.

Source : Internet

Parlons des trois lois qui traitent du système partisan au Bénin :

  • La charte des partis politiques

Les béninois sont tous d’accord sur l’urgence de la réforme du système partisan du pays. La Commission en charge des réformes politiques et de la révision constitutionnelle mise en place par le Président Talon a, considéré cette question comme l’une de ses priorités. Cette réflexion partage quelques facteurs auxquels il faut faire attention afin d’éviter que les réformes posent plus de problèmes qu’elles ne sont supposées régler.

Composé de 70 articles, la nouvelle loi vise à réorganiser le paysage politique béninois afin de permettre au pays d’avoir des formations politiques ayant un ancrage véritablement national et pouvant bénéficier du financement public. En effet, pour la création d’un parti politique, la nouvelle loi exige au moins 1.155 membres fondateurs sur l’ensemble du territoire national, soit 15 membres fondateurs par commune, contrairement à l’ancienne loi qui exige 10 membres fondateurs par département, soit 120 membres fondateurs au plan national.

La nouvelle Charte des partis politiques en République du Bénin pose également les conditions pour le financement public des partis politiques. En effet, seuls les partis politiques ayant obtenu, lors des élections législatives précédentes, un nombre de députés correspondant à un cinquième (1/5) du nombre de députés composant l’Assemblée Nationale et provenant d’un nombre de circonscriptions électorales équivalant au minimum au quart (1/4) du nombre total des circonscriptions, peuvent bénéficier du financement public. « Les partis politiques doivent obligatoirement remplir ces deux conditions avant de prétendre bénéficier de l’aide de l’Etat », précise le texte.

  • Le code électoral

Mises à part quelques modifications apportées sur certains aspects, la loi 2018-31 portant code électoral en République du Bénin a été adoptée par la majorité des députés présents et représentés.

Composé de 397 articles répartis en 7 livres, le nouveau code contient quelques nouveautés. Au nombre de ces dernières, on peut noter les cautions pour des élections présidentielles et législatives qui passent respectivement à 250 millions FCFA et 249 millions FCFA. Aussi, est-il précisé qu’avant de prétendre valider les sièges à l’Assemblée Nationale pour une liste d’un parti politique, ceci  est subordonnée à l’option de réunir 10% du suffrage nationale par la liste. Les cautions pour les élections locales, communales et municipales ont été revues à la baisse. Elles passent de 20.000 FCFA à 10.000 FCFA.

  • Le financement des partis politiques

  Comme suscitée, il ressort que le texte de loi dispose en son article 39 que, le financement public à un parti politique est acquis lorsque, pendant les élections législatives ayant précédé l’exercice, le parti a obtenu un nombre de députés correspondant à un cinquième (1/5) du nombre de députés composant l’Assemblée Nationale et provenant d’un nombre de circonscriptions électorales équivalent au maximum au quart (1/4) du nombre total de circonscriptions électorales. A l’article 40, les subventions de l’Etat aux partis politiques représentent l’aide destinée au financement des activités des partis politiques. Elle est repartie aux partis politiques représentés à l’Assemblée Nationale en proportion du nombre de députés élus sur leur liste. Ce financement pourrait être de l’ordre de cinq (05) milliards de FCFA. La répartition ne varie pas au cours d’une législature, même en cas de modification du nombre de députés d’un parti politique quels qu’en soient les motifs. Obligation est également faite aux partis politiques de déposer les comptes de campagne électorale à la Chambre des comptes de la Cour suprême.

Ces deux lois déjà votées et la troisième (loi sur le financement des partis politiques) constituent un tournant majeur dans le giron politique béninois.

Depuis la mise en vigueur de ces deux lois et dans l’attente de la troisième loi, c’est le branle-bas au niveau de la classe politique. Du côté de la mouvance, on parle des blocs et au niveau de l’opposition, les rapprochements se font au point qu’il n’est pas exclu de voir les FCBE et l’USL s’unir pour faire face aux nouvelles dispositions. C’est d’ailleurs ce qui fait dire à certains que ces trois lois pourraient être des lois solutions au système partisan au Bénin.

Ont-ils raison ? L’avenir nous le dira.

A.A.

Laissez un commentaire

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Articles Liés

L’éphéméride de l’Espoir: Le Président Léon Mba.

Léon Mba, né le 09 février 1902 à Libreville est un homme...

Sensibilisation sur le code de la route aux têtes couronnées du Zou : Luc Atrokpo fait don de casques

Luc Atrokpo, le président de l’Association nationale des communes du Bénin (Ancb),...

Départements de Kani et Dianra en Côte-d’Ivoire : Un important gisement d’or découvert

Après les grandes découvertes dans le secteur pétro-gazier ivoirien, avec les champs...