Activité diplomatique du Président Russe : Le périple de Vladimir Poutine (Après la Corée du Nord, le patron du Kremlin au Vietnam)

Vladimir Poutine est arrivé hier, jeudi 20 juin 2024, à Hanoï au Vietnam, ce fidèle allié du Président Russe.
Au lendemain donc de sa visite en Corée du Nord, le Président Russe se rend au Vietnam, un Etat proche de Moscou depuis l’époque soviétique.
Il effectue une visite d’Etat dans ce pays allié de longue date et fidèle acheteur d’armes russes. Votre journal fait le point sur les raisons de cette entente entre Moscou et Hanoï, nouvelle étape de la tournée diplomatique du Président Russe.

Pourquoi s’entendent-ils bien ?
La proximité entre Hanoï et Moscou tire ses racines de l’époque soviétique. Durant des décennies, l’URSS a formé des cadres du parti communiste vietnamien (PCV), dont Ho Chi Minh, le père de l’indépendance, qui s’est rendu sur place pour la première fois en 1923. Durant la guerre du Vietnam, le pouvoir soviétique a fourni armes, avions de chasse, tanks et des milliers de soldats à son allié du Nord, en réponse à l’intervention directe de Washington qui soutenait le Sud capitaliste.
Depuis l’effondrement de l’URSS, la Russie continue de jouir d’une image positive au Vietnam, qui a pris le tournant de l’économie de marché dans les années 1980. En 2012, Hanoï a hissé Moscou au rang de partenaire « stratégique spécial », soit le plus haut degré de coopération après la Chine (2008), mais avant les Etats-Unis (2023).

Que vient faire Vladimir Poutine ?
Le Vietnam est le troisième pays visité par Vladimir Poutine depuis sa réélection en mars dernier, après la Chine et la Corée du Nord. Le dernier déplacement du maître du Kremlin dans le pays d’Asie du Sud-Est remonte à 2017, à l’occasion d’un sommet de la Coopération économique pour l’Asie-Pacifique (Apec). Il s’agit d’une opportunité pour le Président Russe de montrer qu’il dispose d’un allié « économique et politique de plus en plus courtisé par l’Occident », explique Huong Le Thu, directrice adjointe du programme Asie du centre de réflexion International Crisis Group.
Le Vietnam, cent millions d’habitants, représente un marché à fort potentiel pour la Russie, sous le coup de sanctions occidentales, d’autant plus que le volume des échanges entre les deux pays (3,5 milliards de dollars en 2022) reste très inférieur aux niveaux constatés entre le Vietnam et la Chine (175 mds USD) ou les Etats-Unis (123 mds USD).
La visite de Vladimir Poutine doit améliorer et renforcer la coopération dans les domaines de l’investissement, des technologies, de l’énergie, ou de la sécurité, a indiqué mercredi l’ambassadeur Russe à Hanoï, cité par un média d’Etat vietnamien.
Le Vietnam est un client de longue date pour le matériel militaire russe : les importations d’armes en provenance de Russie ont atteint 7,6 milliards de dollars entre 1995 et 2023, soit plus de 80 % du total de l’armement acheté par le Vietnam à l’étranger, selon les chiffres de l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri). Si depuis 2020, on voit un ralentissement, les deux pays ont un « intérêt mutuel à reprendre les ventes d’armes », a estimé Carl Thayer, professeur émerite à l’université australienne de Nouvelle-Galle du Sud, dans un contexte de tensions en mer de Chine méridionale. « Mais le Vietnam est paralysé par la menace des sanctions américaines », a-t-il ajouté.

Hanoï court il un risque ?
En accueillant Vladimir Poutine, visé par un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale (CPI), Hanoï – qui ne reconnaît pas la CPI – risque la réprobation de ses partenaires occidentaux que le régime communiste tente également de choyer. La politique étrangère du régime est régie par les principes souples de la « diplomatie du bambou », cherchant à éviter de s’associer trop étroitement à une grande puissance, définie par l’homme fort du régime communiste, Nguyen Phu Trong, le Secrétaire général du PCV.
Le Président américain, Joe Biden et son homologue chinois, Xi Jiping se sont tous deux rendus au Vietnam l’an dernier. Sur fond de rivalités entre la Chine et les Etats-Unis en Asie, Hanoï joue la carte du pragmatisme et de la prudence, vue comme bénéfique pour l’économie. Mais la guerre en Ukraine a rendu difficile ce jeu d’équilibriste, selon des experts bien avertis.
Le Vietnam n’a pas participé au premier sommet pour la paix en Ukraine, organisé en Suisse mi-juin. Vladimir Poutine a salué l’approche « équilibrée » de Hanoï sur la question ukrainienne, dans une tribune publiée mercredi par le journal du PCV. Hanoï pourrait également chercher le soutien de Moscou pour intégrer le groupe des Brics, selon des analystes.
Pour Vladimir Poutine : l’amitié entre la Russie et le Vietnam a fait ses preuves

A l’occasion de cette visite d’État au Vietnam les 19 et 20 juin à l’invitation du Secrétaire général du Comité central du Parti communiste du Vietnam, Nguyen Phu Trong, le Président Russe Vladimir Poutine a écrit une tribune pour publication dans le journal Nhân Dân (Le Peuple). Bénin Espoir publie ici le contenu de l’article.

« À la veille de ma prochaine et cinquième visite en République socialiste du Vietnam, je voudrais partager ma vision sur l’histoire, l’état actuel et l’avenir du partenariat russo-vietnamien.
Il est symbolique que ma visite au Vietnam a lieu à l’occasion de célébration du 30e anniversaire de la signature du Traité sur les principes principaux des relations d’amitié Russie-Vietnam. Ce document stratégique a ouvert de larges opportunités pour renforcer et développer l’ensemble des relations bilatérales. Dans la nouvelle étape historique, il donne une impulsion puissante au développement de plus en plus dynamique des relations entre les deux pays.
À l’origine de notre coopération bilatérale est un grand homme du peuple vietnamien et un grand ami de notre pays, Hô Chi Minh. La Russie se souvient toujours du Président Hô Chi Minh, un patriote, homme politique et homme d’État exceptionnel, qui a toujours défendu avec fermeté et détermination la souveraineté et la liberté de sa patrie. Je voudrais noter que l’année dernière, un monument dédié à la mémoire du premier président du Vietnam a été érigé à Saint-Pétersbourg en l’honneur du 100e anniversaire de sa visite dans la « capitale du nord » de la Russie.
Notre pays a apporté une aide significative à la lutte héroïque du peuple vietnamien contre les envahisseurs étrangers. Après la victoire et la libération complète du Vietnam des occupants, des experts en construction, ingénieurs, médecins, enseignants et scientifiques soviétiques ont aidé le Vietnam à reconstruire le pays. Nous avons fait beaucoup pour développer son potentiel économique et de défense et résoudre les problèmes sociaux prioritaires.
Ces traditions éprouvées de camaraderie et d’assistance mutuelle constituent une base solide pour le développement ultérieur des relations bilatérales dans le cadre d’un partenariat stratégique intégral.
Le Vietnam est une civilisation ancienne, brillante et indépendante dans la mosaïque d’un monde multipolaire. Sur la scène internationale, le Vietnam mène une politique étrangère indépendante et est un fervent partisan d’un ordre mondial juste fondé sur le droit international, sur les principes d’égalité de tous les États et de non-ingérence dans leurs affaires intérieures.
Nous saluons le fait que nos deux pays ont des approches coïncidentes ou similaires sur les questions actuelles de l’agenda international. Les deux pays se coordonnent étroitement sur les principales plateformes multilatérales, principalement aux Nations Unies. Nos deux pays ont des évaluations similaires de la situation dans la région Asie-Pacifique. Nous considérons le Vietnam comme un partenaire partageant les mêmes points de vue sur la formation d’une nouvelle architecture de sécurité eurasienne égale et indivisible – sur une base inclusive et non discriminatoire.
Nous sommes reconnaissants à nos amis vietnamiens pour leur position équilibrée sur la crise ukrainienne et pour leur désir de contribuer à la recherche de véritables moyens de la résoudre pacifiquement. Tout cela est pleinement conforme à l’esprit et à la nature de nos relations.
Il est important que les deux pays accordent constamment une attention particulière à l’approfondissement des échanges commerciaux et à la stimulation des investissements. Ainsi, selon les statistiques russes, en 2023, le chiffre d’affaires du commerce bilatéral a augmenté de 8% et au premier trimestre de cette année, de plus d’un tiers par rapport à la même période de l’année dernière. Des produits alimentaires, des matières premières minérales, des machines et des équipements russes sont exportés vers le Vietnam. De nombreux produits vietnamiens, notamment des vêtements, des fruits, des légumes et d’autres produits agricoles, trouvent leurs consommateurs sur le marché russe. L’accord de libre-échange entre l’Union économique eurasienne et le Vietnam, conclu en 2015, contribue à consolider et développer ces tendances positives.
Entre nos pays, il existe la possibilité de règlements en monnaies nationales – roubles russes et dongs vietnamiens. L’année dernière, ces transactions ont représenté plus de 40 % du volume des échanges bilatéraux. Et au premier trimestre de cette année – près de 60 %. Cela s’inscrit dans la tendance mondiale visant à éliminer progressivement l’utilisation de monnaies qui ont perdu de crédibilité dans le commerce et les investissements internationaux. La banque commune Vietnam-Russie (VRB) joue un rôle majeur dans la garantie de transactions financières fiables et j’ai participé à la cérémonie d’ouverture de celle-ci en 2006. Nous espérons qu’elle poursuivra ses activités en contribuant activement à l’approfondissement de la coopération économique entre nos États.
Le secteur de l’énergie reste un secteur stratégiquement important de la coopération bilatérale. La coentreprise Vietsovpetro, qui développe des gisements sur le plateau continental vietnamien depuis plus de quatre décennies, fait preuve d’une grande efficacité. Le volume de pétrole produit par elle au fil des ans a dépassé 250 millions de tonnes. La société commune Rusvietpetro, créée en 2008, opère avec succès dans le district autonome de Nénétsie en Russie. Dans les conditions difficiles du Grand Nord, elle a déjà extrait des profondeurs plus de 35 millions de tonnes de pétrole. À son tour, le groupe Gazprom exploite du gaz au Vietnam, tandis qu’une autre grande entreprise russe, Novatek, envisage de déployer des projets de gaz naturel liquéfié (GNL) sur le territoire vietnamien.
Une initiative est en cours d’élaboration pour créer un Centre de science et technologie nucléaires au Vietnam avec l’aide de Rosatom. Je voudrais noter à cet égard que la société d’État russe Rosatom se tient prête à aider ses partenaires vietnamiens dans la formation de l’industrie nationale de l’énergie nucléaire, y compris en renforçant son potentiel en ressources humaines.
Notre pays a traditionnellement apporté une grande contribution au développement du potentiel hydroélectrique du Vietnam. Ainsi, la société RusHydro souhaite participer à la rénovation et à l’augmentation de la capacité des centrales hydrauliques au Vietnam.
A Da Nang, la coentreprise GAZ-Thanhdat développe ses activités d’assemblage d’équipements automobiles de la marque russe GAZ.
Nous espérons que les investisseurs vietnamiens exploiteront également plus activement les vastes opportunités offertes par le marché russe. C’est par exemple le cas de la société vietnamienne TH Group, qui construit des usines de transformation du lait dans les régions de Moscou et de Kalouga, ainsi que dans le territoire de Primorsky.
Bien sûr, je ne peux m’empêcher de mentionner les traditions de longue date de coopération bilatérale dans le domaine de l’éducation. Au cours des dernières décennies, des dizaines de milliers de spécialistes vietnamiens dans divers domaines ont été formés et ont amélioré leurs compétences dans notre pays, et plusieurs milliers ont obtenu des diplômes universitaires russes. Nous avons l’intention de continuer à accorder une attention accrue au partenariat dans ce domaine. Nous continuerons notamment à former des citoyens vietnamiens dans les universités russes avec des financements du budget fédéral. Nous ferons de notre mieux pour favoriser les échanges d’étudiants et le lancement de projets et programmes académiques communs. Un exemple frappant d’une telle coopération positive entre nos pays est l’action du Centre russo-vietnamien de recherche et de technologie tropicale, au sein duquel la recherche appliquée et fondamentale est menée depuis de nombreuses années.
Bien entendu, nous continuerons à développer les contacts humains. Je sais que de nombreux Vietnamiens connaissent et aiment la musique, la littérature et le cinéma russes. Et les Russes manifestent un réel intérêt pour l’art vietnamien original. Les Journées de la culture vietnamienne en Russie, qui devront être organisées au début du mois prochain, permettront aux habitants russes de mieux connaître l’art vietnamien.
Le tourisme contribue certainement à approfondir la compréhension mutuelle entre nos peuples. Le Vietnam est depuis longtemps devenu l’une des destinations de vacances populaires des Russes et les citoyens vietnamiens ont toujours été attirés par les sites touristiques de notre pays. Une augmentation du nombre de vols directs contribuerait à la stimulation des flux touristiques dans les deux sens.
Avec nos amis vietnamiens, nous continuerons à renforcer les relations bilatérales et à développer la coopération au profit de nos peuples, dans l’intérêt de la stabilité et de la prospérité de la région et du monde dans son ensemble. Je suis convaincu que nos deux pays, s’appuyant sur les meilleures traditions d’amitié, de confiance et d’assistance mutuelles, atteindront tous leurs grands objectifs fixés.
Je tiens à formuler au peuple vietnamien mes vœux de paix, de bonheur et de prospérité. »

Mick de BADAR
(Sources internet

 

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