Résultats de l’élection présidentielle au Tchad : Mahamat Idriss Deby élu (Le Président de la transition Tchadienne est élu à 61,03 % contre 18,53 pour Succès Masra)

 

Au Tchad, Mahamat Idriss Itno Déby déclaré vainqueur de l’élection présidentielle mais son principal concurrent, Succès Masra, conteste les résultats provisoires donnés par les structures habilitées à le faire.
Le Président de la transition, chef de l’Etat sortant, a été déclaré élu dès le premier tour de l’élection présidentielle avec 61,03 % des voix, selon des résultats officiels encore provisoires. Ceci, trois ans après avoir pris le pouvoir à la tête d’une junte militaire. Son challenger, le Premier Ministre, Succès Masra, battu, conteste cette victoire.
Mahatma Idriss Itno Déby, 40 ans, a recueilli 61,03 % des voix, selon les résultats officiels provisoires de la commission électorale (CE) qu’il avait nommée, contre 18,53 % à Succès Masra, 40 ans aussi. Le taux de participation est officiellement de 75,89 %. Ces décomptes doivent encore être validés par le Conseil constitutionnel.
Juste après l’annonce, des militaires ont tiré en l’air à l’arme légère à N’Djamena dans le quartier où siège le parti de Succès Masra, de joie mais aussi manifestement pour dissuader les gens de se rassembler, ont rapporté des journalistes de l’Agence France-Presse (AFP).
C’était l’inverse près du palais présidentiel, où de nombreux partisans de Mahatma Idriss Itno Déby célébraient sa victoire en criant, chantant et klaxonnant dans leurs voitures, recouvertes du drapeau tchadien pour certaines. Des soldats mais aussi de simples citoyens manifestaient leur joie à coups de rafales de kalachnikovs en l’air. Au moins deux adolescents ont été blessés par des balles qui retombaient, a témoigné un journaliste de l’AFP.

Un résultat rejeté par l’opposition notamment Succès Masra qui avait revendiqué la victoire avant la proclamation des résultats officiels dans un long discours sur sa page Facebook où il accusait par avance le camp Déby d’avoir truqué les résultats pour annoncer la victoire du pouvoir de la transition.
Invoquant la compilation des comptages des bulletins par ses propres partisans, il a appelé les Tchadiens à « ne pas se laisser voler la victoire » et à la « prouver » en « se mobilisant pacifiquement, mais fermement ».
« Je suis désormais le Président élu de tous les Tchadiens », a énoncé quand à lui Mahatma Idriss Itno Déby dans un bref discours télévisé au ton monocorde, promettant de mettre en œuvre ses « engagements ».
Ce scrutin devait marquer la fin d’une transition militaire de trois ans et nombre d’observateurs l’estimaient joué d’avance en faveur du Général Deby, proclamé chef d’Etat le 20 avril 2021 pour remplacer son père, Idriss Déby Itno, qui venait d’être tué par des rebelles en se rendant au front, après avoir dirigé d’une main forte, trente années durant, ce vaste pays sahélien.
Le plus farouche pourfendeur de « la dynastie Déby » d’alors, Succès Masra, s’était finalement rallié à la junte et le Général l’avait nommé Premier Ministre quatre mois avant le scrutin. Le reste de l’opposition, muselée et violemment réprimée, dans le sang parfois, l’avait accusé d’être un « traître » et d’être candidat à la présidentielle pour « donner un vernis démocratique et pluraliste » à un scrutin joué d’avance pour Déby.
Mais l’économiste Masra a surpris tout le monde en rassemblant des foules considérables durant sa campagne, au point de s’enhardir et se dire capable de l’emporter, sinon de pousser Mahatma Idriss Itno Déby jusqu’à un second tour le 22 juin.

Si les partisans de Masra protestent contre son élection dans la rue, cela pourrait ouvrir la voie à des violences meurtrières, les manifestations de l’opposition étant systématiquement réprimées dans ce pays marqué, depuis son indépendance de la France en 1960, par les coups d’Etat, les régimes autoritaires et les assauts réguliers d’une multitude de rébellions.
Mahamat Idriss Itno Déby avait été adoubé dès son installation par l’armée en 2021 par une communauté internationale, la France en tête, prompte à condamner les putschistes ailleurs en Afrique. Le pays du Général de Gaulle entretient encore un millier de militaires au Tchad, considéré comme un pilier de la lutte contre les djihadistes au Sahel, après que les soldats français ont été expulsés du Mali, du Burkina Faso et du Niger.
Huit autres candidats se sont partagé les miettes des suffrages, à l’exception de l’ancien Premier Ministre Albert Pahimi Padacké, qui a récolté officiellement 16,91 % des voix.
Trois ans après sa prise du pouvoir en dehors de tout processus constitutionnel, le Général Mahatma Idriss Itno Déby a donc fait légitimer sa présidence dans les urnes. Nombre d’observateurs prédisaient qu’il s’agirait d’une formalité, comme pour son père, officiellement élu et réélu confortablement six fois après son coup d’Etat de 1990.
Les observateurs mis à l’écart
Au diapason du reste de l’opposition qui appelait à boycotter le scrutin, la Fédération Internationale pour les droits humains (FIDH) s’était inquiétée, le 03 mai, d’une « élection qui ne semble ni crédible, ni libre, ni démocratique », « dans un contexte délétère marqué par (…) la multiplication des violations des droits humains ».
Le mercredi, le parti de Succès Masra, Les Transformateurs, a dénoncé des « menaces graves » contre son chef et ses partisans ainsi que « des violences et arrestations arbitraires » visant ces derniers depuis le scrutin. Succès Masra a fait l’objet de « surveillance » et de « menaces à sa sécurité (…) extrêmement graves », a assuré son parti, dans un communiqué publié sur sa page Facebook.

L’Union européenne, de son côté, avait déploré, la mise à l’écart de 2 900 observateurs de la société civile, ce qui nuit, selon elle, à « la transparence » de l’élection présidentielle, mise en doute par l’opposition et plusieurs ONG internationales. Ces dernières avaient déjà émis des réserves sur la « crédibilité » et la transparence d’une élection qu’elles jugeaient, au diapason de l’opposition, jouée d’avance en faveur de Mahamat Idriss Déby Itno.
La communauté internationale est désormais suspendue à la proclamation officielle des résultats définitifs par les instances appropriées.

Mick de BADAR

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