Les membres de la Cour constitutionnelle étaient en audience plénière le jeudi 13 Février 2025. 24 dossiers de recours ont été examinés dont cinq (5) concernaient M. Rachidi GBADAMASSI et cinq (5) autres sur les déclarations de Bertin KOOVI à propos d’une éventuelle nouvelle République et de l’éligibilité du Président Patrice Talon à un second mandat en 2026.
Votre journal publie ici le résumé de quelques décisions rendues.
– Décision DCC 25-039 du 13 février 2025.
La Cour constitutionnelle, saisie par une requête en date du 9 janvier 2025, enregistré à son secrétariat à la même date, par laquelle M. Bernardin ADO, sollicite la modification de l’article 42, nouveau, alinéa 2 de la Constitution, relatif au mandat présidentiel.
Vu la Constitution, vu la loi numéro 2022-09-17-2022 portant loi organique de la Cour constitutionnelle, vu le règlement intérieur de la Cour constitutionnelle, ensemble les pièces du dossier, ouï M. Michel Adjaka en son rapport.
Après l’avoir délibéré,
En conséquence, la Cour est incompétente.
– DECISION DCC 25-043 du 13 Février 2025
La Cour constitutionnelle, saisie par requête en date du 1er février 2025 enregistrée sous le numéro 0231/059/REC 25 par laquelle, M. Landry-Angelo ADELAKOUN et consorts demandent à la Cour de déclarer irrecevable le recours de M. Christian Enock LAGNIDE relatif à la demande d’avis sur certaines questions constitutionnelles majeures.
Vu la constitution, vu la loi numéro 2022-09-26 juin 2022, pourtant loi organique sur la Cour constitutionnelle, vu le règlement intérieur de la Cour constitutionnelle, ensemble les pièces du dossier, ouï, M. Cossi Dorothé SOSSA en son rapport après en avoir délibéré:
En conséquence, dit que le recours sous examen est devenu sans objet et ordonne sa radiation du rôle. La présente décision sera notifiée M. Landry-Angelo ADELAKOUN et consorts et publiée au journal officiel.
– Décision DCC 25-044 du 13 Février 2025
La Cour constitutionnelle, saisie par requête en date du 28 janvier 2025 par laquelle M. Nourou Dine Moussa Mouhamed introduit devant la haute juridiction un recours aux fins de convocation de M. Bertin KOOVI pour exposer son argumentaire relatif à la révision constitutionnelle et sa sollicitation d’un avis sur la qualification juridique des modifications apportées.
Saisie par une autre requête en date à Dogbo du 29 janvier 2025 par laquelle M. Mohamed Joseph Gabin-Degbey, saisie d’un recours aux mêmes fins.
Saisie par une troisième requête en date à Cotonou du 3 février 2025 par laquelle M. Bertin KOOVI, président du Mouvement Dynamique Talon Continue, formule une demande de reconnaissance de la rupture constitutionnelle de 2019 et de la naissance d’une nouvelle république, ainsi que de l’éligibilité du président Patrice Talon, à un second mandat en 2026.
Vu la constitution, vu la loi n°2022-09 du 27 juin 2022, pour être en loi organique sur la Cour constitutionnelle, vu le règlement intérieur de la Cour constitutionnelle, ensemble, les pièces du dossier, ouï, M. Cossi Dorothé SOSSA en son rapport. Après en avoir délibéré,
En conséquence:
Article 1er: ordonne la jonction des recours sous le numéro 0189-054, REC -25.
Article 2: dit que les recours sont irrecevables.
Ces décisions de la Cour constitutionnelle, à ce stade, met fin au suspense sur la possibilité ou non de Patrice Talon de briguer un nouveau mandat en 2026. Même si une clarification de la Cour constitutionnelle sur l’entrée ou non du Bénin dans une nouvelle République suite à la révision constitutionnelle intervenue en 2019, aurait été plus judicieuse .
Cette clarification trancherait, du moins sur le plan constitutionnel, le débat sur l’éligibilité de l’actuel chef de l’État à un nouveau mandat en 2026. Mais cette clarification n’est pas intervenue et nous voici dans l’obligation de faire des déductions: Pas de nouvelle République, du moins à ce stade.
La Cour constitutionnelle a été pourtant saisie de ces recours portant précisément sur la question, elle a, au terme d’une audience du jeudi 13 février 2025, rendu son verdict. La haute juridiction a jugé les recours irrecevables. Les recours rejetés émanent de Nourou Dine Moussa Mohamed, de Joseph Dégbey et de Bertin Koovi.
Dans le recours qu’il a déposé le 29 janvier 2025, Nourou Dine Moussa Mohamed demande à la Cour de convoquer Bertin Koovi pour exposer son argumentaire relatif à la révision constitutionnelle et son avis sur la qualification juridique des modifications apportées.
Dans sa requête, en date du même jour, Joseph Dégbey saisit également la Cour aux mêmes fins. Bertin Koovi, Président du mouvement dynamique Talon continue, a aussi saisi la Cour par une requête le 3 février 2025, demandant la reconnaissance de la rupture constitutionnelle de 2019 et l’éligibilité de Patrice Talon à un second mandat en 2026.
Les arguments développés
Nourou Dine Moussa Mouhamed expose que, par une déclaration publique abondamment relayée, Bertin Koovi a exprimé des préoccupations majeures relativement à la modification constitutionnelle en 2019. Il a notamment laissé entendre que cette révision aurait entraîné l’établissement d’une nouvelle République au Bénin.
Le requérant indique que Bertin Koovi soutient que, contrairement aux discussions de l’article 2 de la loi de modification constitutionnelle de 2019, il n’appartient pas au pouvoir constituant dérivé de déterminer lui-même si, a priori, une révision constitutionnelle entraîne ou non une nouvelle constitution. ». Pour Bertin Koovi, seule la Cour constitutionnelle a cette compétence.
Nourou Dine Moussa Mouhamed demande dès lors à la Cour, afin d’éviter toute confusion institutionnelle et permettre une application harmonieuse des textes constitutionnels révisés, d’inviter Bertin Koovi pour qu’il expose son argumentaire devant elle. Le requérant sollicite de la Cour qu’elle se prononce officiellement sur la portée et l’impact de la révision constitutionnelle de 2019 au regard des précis fondamentaux de la Constitution de 1990.
Ceci, souhaite-t-il, en clarifiant, si tel que le prétend Bertin Koovi, « les modifications introduites en 2019 ont altéré la nature fondamentale de la Constitution de 1990, au point d’entraîner l’établissement d’une nouvelle République » .
Joseph Dégbey fait également remarquer que les déclarations relayées dans l’opinion publique suscitent des discussions et ravivent l’espoir de nombreux citoyens attachés à la continuité du développement sous Patrice Talon. Il souligne que l’interprétation de Bertin Koovi pourrait provoquer des incompréhensions et des tensions politiques et sociales, ce qui rend impératif que la Cour constitutionnelle se prononce.
Pour sa part, Bertin Koovi fait valoir que le Bénin est entré dans une nouvelle République suite à deux événements majeurs : la révision constitutionnelle de novembre 2019 et le vide juridique créé par l’absence d’élection présidentielle en avril 2021. Selon lui, cette révision a introduit des modifications profondes qui ne peuvent être considérées comme des ajustements mineurs. Il cite notamment la création du poste de vice-président et les changements dans le système électoral.
Bertin Koovi soutient que les nouvelles dispositions concernant l’élection et le mandat présidentiel sont entrées en vigueur lors des élections de 2021, ce qui signifie que le premier mandat de Patrice Talon (2016-2021) ne peut être comptabilisé sous l’ancienne constitution. Il conclut que l’article 42 de la nouvelle constitution ne devrait pas empêcher son éligibilité pour un second mandat.
L’analyse de la Cour
La Cour a décidé d’examiner les recours ensemble en raison de leur lien évident. S’appuyant sur les dispositions des articles 3 alinéa 3, 122 de la Constitution et 37 de la loi organique de la juridiction, elle rappelle que le citoyen ne peut saisir la haute juridiction que pour des violations des droits humains ou pour contrôler l’inconstitutionnalité des lois.
En l’espèce, les requérants cherchent à éclaircir si une nouvelle République a été instaurée par la réforme constitutionnelle et si Patrice Talon est éligible pour un second mandat.
La Cour constitutionnelle estime que cette demande, formulée sans contentieux, s’analyse comme une demande d’avis. Or, les citoyens n’ont pas qualité pour demander un avis à la Cour constitutionnelle. C’est pourquoi elle a déclaré irrecevables les trois recours.
Mesmin Afanou